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J’ai écrit cet article pour le « Blog de la Relation Client » de l’éditeur Easiware. Il a été publié en 3 parties en décembre 2020 et janvier 2021. Le voici en entier.
Une fois que vous avez conçu « sur papier » l’expérience client, le volet mise en oeuvre et déploiement est souvent critique. C’est la partie conception de nouveaux services, afin de concrétiser cette nouvelle expérience, qui est la plus difficile à créer et à pérenniser.
Les entreprises doivent gérer cinq éléments lors de la conception de services : les personnes, les pratiques, les processus, les politiques et les systèmes.
Pour l’aspect humain, avoir une vision centrée client et la stratégie correspondante est clé, mais les entreprises ont souvent du mal à motiver et engager les collaborateurs, pour mettre en oeuvre et délivrer ces services efficacement.
Le bien-être des collaborateurs est nécessaire mais insuffisant pour qu’ils s’approprient le volet opérationnel (les méthodes de design de services et l’organisation appropriée). Dans cet article, voici comment des professionnels de l’expérience client et du marketing gèrent l’alignement des collaborateurs, leur engagement et leur implication pour transformer leur entreprise par l’expérience client grâce à la conception ou design de service.
Si vous êtes une PME – PMI, vous trouverez de quoi vous inspirer… à défaut de savoir par où / quoi commencer, je peux vous y aider.
Résumé de l’article pour ceux ou celles qui sont pressé(e)s :
Priorité à l’implication de la direction et à l’adhésion des cadres supérieurs
Le PDG et les cadres supérieurs devraient être les premiers à être impliqués ; il est alors crucial de leur parler chiffres, de leur faire « goûter » aux ateliers de design thinking et de les laisser s’imaginer comment ils pourraient bénéficier d’une organisation orientée vers le design de service.
Favorisez la collaboration
Il est important de motiver les gens malgré 1) les silos qui cloisonnent les services, 2) les conflits d’objectifs et de priorités entre les différents services / agences /équipes / projets et 3) la résistance au changement. L’organisation et l’animation d’ateliers collaboratifs, pour mieux impliquer les collaborateurs, devraient aider à mettre en oeuvre vos services nouvellement conçus. Tout d’abord, créez un lien émotionnel et intellectuel fort avec votre projet de conception de service. Ensuite, impliquez vos collaborateurs. Ce qui signifie qu’ils devraient contribuer aux décisions et activités du projet (empowerment).
Soyez clair sur le rôle de chacun et les compétences nécessaires.
Commencez par une petite équipe transversale, en incluant les designers. Donnez aux middle managers les moyens d’allouer du temps et des ressources à leurs équipes. Montrez à chacun l’impact qu’il a sur la prestation de services et donc l’expérience vécue par le client et recrutez des personnes ayant des soft skills comme l’empathie, la flexibilité et l’imagination.
Comment l’engagement des collaborateurs booste l’expérience client
L’expérience collaborateurs nourrit leur engagement, qui à son tour dope la qualité de prestation de services et l’expérience client qui en résulte.
Pour mettre en place ce cercle vertueux, je vous conseille d’aligner les moyens nécessaires pour fournir le service & personnes, outils et systèmes & avec l’expérience client ciblée. Et c’est exactement ce que le design de service aide les entreprises à accomplir.
D’abord qu’est-ce que le design de service ?
Cela consiste à concevoir des services de façon holistique, agile et collaborative autour des différentes étapes d’interaction entre les utilisateurs, les points de contact, le personnel en contact (par ex. service réclamations et commercial) mais aussi les acteurs (collaborateurs, fournisseurs, sous-traitants, partenaires) et les systèmes en coulisses (non visibles du client et qui font « tourner la machine »).
Une approche design de service aide de trois façons :
- L’engagement des collaborateurs augmente la satisfaction des clients. Une étude de Gallup (avril 2017) montre que les organisations qui ont des collaborateurs très engagés enregistrent une hausse du taux de satisfaction de 10% et une augmentation de leurs ventes de 20%.
Cela s’explique par le fait qu’elles ont un plus grand taux d’engagement des collaborateurs envers la qualité et la sécurité. Les collaborateurs engagés ont à coeur les préoccupations des clients. Ils respectent plus les processus, normes et systèmes.
- L’engagement est une interaction mutuellement bénéfique. L’engagement des collaborateurs fait qu’ils se sentent valorisés pour leur contribution personnelle. C’est le résultat de l’acceptation des valeurs et des objectifs de l’entreprise. L’engagement contribue à augmenter la productivité et nourrit la fidélité des collaborateurs.
- Un employé impliqué jouera un rôle actif dans l’entreprise. L’employé concerné mettra en oeuvre de nouvelles initiatives, s’en appropriera, et participera activement au changement. La participation est la poursuite active de ces objectifs. Un collaborateur impliqué est un cran au-dessus d’un collaborateur engagé : il aide à faire avancer l’organisation et à créer de la valeur pour l’entreprise.
Mais malgré des collaborateurs très satisfaits, les entreprises Françaises n’assurent pas d’un point de vue qualité de l’expérience client !
En effet, il y a un paradoxe en France (par rapport à la Grande Bretagne, l’Allemagne ou les Etats-Unis) :
- Malgré une forte satisfaction au travail, 57 % des entreprises Françaises délivrent une expérience client insuffisante. Selon une étude réalisée par l’IFOP pour le magazine Pèlerin d’avril 2016, 75% des salariés Français déclaraient être heureux au travail. C’est, bien sûr, sans compter les effets de la crise suite à la Covid-19… Cela suggère qu’ils devraient être efficaces pour fournir de bons services et donc une bonne expérience client. Mais la majorité des entreprises Françaises semblent ne pas être pas à la hauteur, d’après des études Forrester de ces 3 dernières années.
- En Europe, la culture centrée client est la deuxième compétence la plus faible. L’étude Forrester sur la maturité de l’expérience client, du 11 février 2019, a révélé que peu d’entreprises françaises ont dépassé le niveau 1 dans l’une ou l’autre des compétences permettant d’être centré client. Ce qui signifie qu’elles ont du pain sur la planche dans ce domaine.
L’empowerment insuffisant des collaborateurs sape le design de services
L’empowerment est littéralement l’acte de donner du pouvoir. C’est donner l’autorité à des collaborateurs de prendre des décisions, rectifier des actions gérer des problèmes, etc. sans passer obligatoirement par le n+1 ou la bureaucratie !
Non ce n’est pas l’anarchie ! L’empowerment est circonscrit.
L’empowerment est une méthode de management des collaborateurs qui leur donne l’autorité et les moyens de renforcer leur capacité d’action et de s’émanciper de toute hiérarchie pour prendre certaines décisions.
lire mon article sur l’empowerment
Pour engager et impliquer des collaborateurs, il faut accepter d’enrichir leur poste de travail en leur donnant plus d’autorité et plus de pouvoir. C’est l’une des conditions pour réussir la conception de nouveaux services qui permettront de concrétiser l’expérience nouvellement conçue (volet opérationnel et organisationnel).
Revenons au design de service !
Il souffre & en France & du fait que :
- Les professionnels en charge de l’expérience client n’engagent pas suffisamment les parties prenantes.
- Les équipes, les métiers et les départements ne s’alignent pas.
Les professionnels de l’expérience client n’engagent pas suffisamment les parties prenantes
La partie la plus importante du design de service est l’étape de mise en oeuvre qui consiste à aligner les personnes, les processus, leurs politiques, les canaux de contact et les équipements, artefacts avec les attentes des clients identifiées et considérées comme prioritaires.
L’étape d’implémentation de la nouvelle expérience client & à travers le design de service &a un impact sur la compréhension des collaborateurs, leurs schémas mentaux, leur travail quotidien, leurs attitudes et comportements et leur volonté de changer.
Les entreprises qui doivent gérer tout ça, baissent souvent les bras devant un mur de résistance et tombent fréquemment dans des compromis qui déforment les intentions premières de l’expérience voulue.
Peut-être, êtes-vous concerné(e) par ce problème ?
Les 5 principales causes de ce problème sont :
- Les PDG manquent d’implication parce qu’ils ont une connaissance insuffisante du design. En France, les PDG et autres dirigeants ne considèrent pas le design comme un outil d’innovation. Il est considéré comme quelque chose liée à l’esthétique et aux formes.
Pourtant, le design c’est aussi un état d’esprit qui aide à créer et matérialiser les services et l’expérience voulue (pour les clients) par l’entreprise et attendue par les clients.
Il y a eu des tentatives d’introduire le design thinking dans les entreprises afin de rééquilibrer le jeu en faveur de l’innovation centrée sur l’humain.
Mais le design thinking n’est pas bien compris. En effet, chacun a sa propre définition, en étant en désaccord sur l’intérêt ou non d’avoir la participation des designers et s’il doit être au service de l’innovation ou de la gestion du changement
- Les ingénieurs, la R&D, et les spécialistes du marketing monopolisent l’innovation dans les entreprises centrées produits. Elles ne considèrent pas le design centré client comme une fonction stratégique pour innover.
Par ex. chez de nombreux fabricants de cosmétiques français, marketeurs et R&D monopolisent et pratiquent encore l’innovation basée uniquement sur l’étude de marché et les benchmarks. Ils ignorent les feedbacks des clients et encore plus les designers.
Malheureusement, les ingénieurs français reconnaissent rarement la valeur du prototypage rapide. Le prototypage rapide est une idée contraire à leur formation. Pourtant, c’est un outil essentiel d’innovation de service, pilotée avec la pensée design.
- L’innovation technologique prime sur l’innovation en matière de services. La dimension service de l’innovation est laissée de côté dans les entreprises ayant une culture essentiellement industrielle.
Et tous les programmes d’aides à l’innovation du gouvernement le prouvent : l’aide financière est principalement destinée aux innovations technologiques. Les ingénieurs, qui ont souvent un rôle moteur, considèrent que l’innovation doit être technologique.
Ainsi, des designers (UX[1], CX[2], produit et service) manquent de reconnaissance professionnelle. Ils sont souvent privés de la phase d’observation des utilisateurs, pendant les étapes de feedbacks et de tests utilisateurs. Ils sont confinés à l’étape de fabrication. Pourtant, ils pourraient suggérer des innovations dans le service, parce qu’ils savent comment passer de l’idée à l’exécution.
- Le design thinking est considéré comme une méthode incomplète. Selon certains dirigeants, le design thinking se limite à la conception et n’inclut pas « l’après » & c’est-à -dire que l’implémentation du produit ou du service conçu n’est pas envisagée.
Les dirigeants estiment que la phase de mise en oeuvre est manquante & les entreprises ne savent pas que le design de « service » inclut la phase de mise en oeuvre, avec l’utilisation de la blueprint (design de processus, mais en mieux) de l’expérience client.
- Les organisations hiérarchiques étouffent l’initiative personnelle. Les décisions découlent du haut vers le bas (top & down) et les collaborateurs des niveaux inférieurs ne sont consultés ni pour leurs opinions ni pour leur participation à la conception des services.
à‡a va ? Vous suivez toujours ?
Attendez, on arrive sur le facteur humain (RH)… !
Les équipes, les métiers et les départements ne s’alignent pas les uns avec les autres
Faites-vous l’erreur de penser qu’en permettant aux métiers de délivrer des services, qu’il est question de designers utilisant leurs compétences, au lieu de collaborateurs à qui on aurait donné le pouvoir de le faire, de façon durable ?
Si c’est le cas, en voici les conséquences :
- Les middle managers sont rarement engagés. L’affectation de ressources au design thinking n’est pas prioritaire face aux tâches et aux objectifs quotidiens des managers.
- Les équipes ont des objectifs différents. Elles ont des priorités, un langage et une compréhension différents de ce qui est important pour les clients. Par conséquent, elles ne prennent pas les bonnes décisions lorsqu’elles alignent le design de service aux attentes des clients.
- Les chefs de projet design ou les responsables de l’expérience client ne savent souvent pas comment écrire un bon brief pour le design de service. Sans ce brief, les parties prenantes ne comprendront pas et ne se l’approprieront pas. Les entreprises ne savent pas toujours ce dont elles ont besoin. Il est nécessaire de découvrir le « Pourquoi » et le « Quoi » avant de réfléchir sur le « Comment ». Il est important de se demander quel est le problème sous-jacent à résoudre pour le client.
- Un manque de clarté avec la matrice RACI & le Réalisateur, l’Approbateur, le Consulté et l’Informé & crée des conflits entre les équipes.
Par exemple, les managers affirment souvent que ce n’est pas de la responsabilité de leurs équipes d’activer le service ou ils sous-estiment leur propre impact sur l’expérience client à délivrer.
Créer une culture de collaboration et d’engagement
Par rapport aux entreprises anglaises bien plus centrées clients[3], les françaises devraient oeuvrer à passer d’une culture centrée uniquement sur les produits ou l’excellence opérationnelle, à une culture centrée sur les services.
En effet, cela améliora le parcours vécu et permettra la délivrance d’une expérience client de qualité [4] .
Pourquoi ? Ne faut-il pas être plutôt centré client, comme je le rabâche depuis 2006 sur clientaucoeur.com ?
Je vais faire une parenthèse explicative : en fait, tant qu’il s’agit de concevoir de nouvelles expériences en récoltant et analysant la connaissance client, en modélisant des parcours clients, etc. Là … il faut être centré client !
Dès lors que vous avez conçu le(s) parcours idéal(aux) « sur papier », alors vous avez tout intérêt à vous focaliser sur le service à délivrer et surtout sur vos collaborateurs.
En concevant le service qui vous permettra de matérialiser cette expérience client, nouvellement conçue, vous ne perdrez pas de vue le client, pour autant !
Donc, le design de service vous permet de passer de la phase conception d’expérience à la phase opérationnelle et organisationnelle.
Parce qu’une entreprise axée sur le service :
1) se concentre sur la conception holistique de ce que le client vit comme expérience auprès de personnes, d’outils (ex. applications ou canaux de contact) et systèmes, même au-delà de ce qu’il ne voit pas (la fameuse ligne de visibilité),
2) implique ses collaborateurs dans la conception du service global – et l’expérience client qui en résulte.
Cela signifie que la culture centrée sur les services est une compétence que les entreprises doivent approfondir — c’est-à -dire, aller au-delà du bonheur au travail des collaborateurs (par ex. Great Place to Work : c’est bien, mais insuffisant).
Pour réussir à motiver les gens & sans avoir d’impact négatif sur leur expérience & dans la transition de la centricité produit à la centricité service, vous devriez :
- Prioriser l’engagement du dirigeant et l’adhésion du comité de direction.
- Favoriser la collaboration en interne.
- àŠtre clair sur le rôle de chacun et utiliser les soft-skills qui sont nécessaires.
Priorisez l’engagement du dirigeant et l’adhésion du comité de direction
Le / la PDG devrait s’engager pour encourager l’usage du design de service. S’il ou elle se sent concerné(e), il ou elle allouera les ressources dont les responsables de l’expérience client ont besoin pour mettre en place une culture de design de service : formation, embauche, évangélisation, adoption à l’échelle de l’entreprise et allocation d’endroits confortables dans les locaux (espaces et laboratoires collaboratifs et d’innovation).
Comment obtenir son support ? Plus facile à dire qu’à faire, allez-vous me dire !
Faites appel à la fois à la raison et à l’émotion :
- Faites une étude de cas de rentabilité. Etablissez un lien avec la stratégie globale de l’entreprise et démontrez le retour sur investissement du design de service. Communiquez sur les succès & même les plus petits & pour convaincre également les ingénieurs ou les cadres exécutifs sceptiques.
- Améliorez la compréhension du design de service en leur permettant de « mettre les mains dans la farine ». Embarquez le/la PDG à faire l’expérience en direct de la créativité et de l’empathie grâce à des ateliers de design thinking pour qu’il/elle se glisse dans la peau du client.
- Donnez du pouvoir aux collaborateurs. Pour transformer des collaborateurs engagés en collaborateurs impliqués (rappel sur la différence entre engagement et implication), montrez au PDG et aux cadres supérieurs comment les « entreprises libérées » ou holacratiques[5] (avec hiérarchie plate) ou, ad minima, les entreprises fonctionnant en escouades (4 à 6 personnes travaillant autour de projets) peuvent responsabiliser les collaborateurs et les rendre engagés à mener des changements réalisables et porteurs de valeur.
Le Groupe Hervé est un fournisseur industriel qui a été l’une des premières entreprises à expérimenter en France, dans les années 2000, une forme d’auto-organisation : les managers ne décident pas, ils sont chargés de favoriser les décisions collectives des salariés et d’assurer la cohérence entre les équipes.
Favi, une fonderie française et sous-traitant des constructeurs automobiles est une entreprise centrée sur le client depuis les années 1980. La direction de Favi met l’accent sur l’amour du client, la confiance dans les personnes, l’innovation et la liberté à s’auto-organiser. Les équipes sont organisées dans de « petites usines » habilitées à changer / adapter leur poste de travail individuel, si besoin.
Favorisez la collaboration
à‡a c’est la partie que je préfère !
Alignez des services et des équipes disparates autour des changements en cours et à venir.
Les gens sont plus enclins à changer les choses lorsqu’ils collaborent et qu’ils ont la maternité ou paternité des idées à déployer.
C’est 12 ans d’expérience qui me font prendre la parole pour vous conseiller de :
- Engager le personnel en contact (par ex. service client ou commercial) tôt dans l’accompagnement au changement. Les middle managers, en particulier, doivent acquérir de l’empathie envers les clients et apporter leurs propres contributions. Donnez-leur les moyens de repenser le service et de mettre en oeuvre de nouveaux modèles opérationnels. Pour ce faire, invitez-les à des ateliers de design thinking et créativité en compagnie de designers. Ils pourraient vous aider à écrire le brief du design de service.
C’est quoi un brief ? C’est un cahier des charges qui stipule les attentes de l’utilisateur ou du client. Il contient toutes les informations récoltées lors de l’étude clients ou utilisateurs : ce qu’il veut faire (jobs to be done), ses contraintes, ses attentes… Le brief identifie le « Quoi » mais aussi le « Pourquoi » et le résultat du Design Thinking le « Comment ».
L’entreprise apprenante est une solution intelligente à envisager, car elle positionne les collaborateurs dans une dynamique d’empowerment sur leur capacité à s’adapter.
La SNCF possède son Université du Service en interne. Elle délivre des formations, des services et des outils pour favoriser l’empathie pour le client et l’imprégnation de la centricité client et de l’expérience client. Par exemple, elle aide les managers intermédiaires et le personnel en contact à accroître leurs compétences en relation client afin de délivrer de meilleures expériences clients.
L’entreprise qui partage la connaissance sur les clients et communique en interne sur les initiatives centrées clients favorise l’appropriation des nouvelles pratiques en apportant du sens. à‡a aide aussi à embarquer les gens dans des démarches collaboratives.
Chez un retailer, le PDG a décidé d’engager les middle managers dès le début et tout au long du processus de design d’expériences et de services. Depuis l’étape de l’étude client (collecte et analyse des feedbacks) à la conception du service, y compris l’étape d’idéation, les managers ont pu comprendre le sens et l’importance de ce qui a été entrepris pour répondre aux irritants des clients. Par conséquent, ils acceptaient plus volontiers de fournir des ressources humaines et du temps pour l’expérience client.
- Réunir des équipes inter-fonctionnelles (transverses). Il est important d’avoir une compréhension de son propre rôle, mais aussi le sens d’une vision commune et d’objectifs partagés. Cela aide à surmonter les désagréments du fonctionnement en silos.
Par exemple, travailler sans designers, comme beaucoup d’entreprises françaises le font souvent, conduit à l’échec – mais s’appuyer uniquement sur les designers n’est pas bon non plus. La diversité des acteurs est importante.
Les équipes les plus performantes en charge de la résolution de problèmes sont cognitivement diverses et petites (environ six personnes).
Travailler avec des consultants externes aide parce qu’ils sont moins contraints par des facteurs humains, financiers et organisationnels internes, de ce fait ils sont plus en mesure d’éviter les biais cognitifs.
Intesa, une banque italienne, a mis en place une « usine numérique » pour aider à transformer les processus back-end (d’arrière-plan… qui font tourner les applications, par ex.). Au lieu de travailler avec une approche descendante, les équipes transverses travaillent avec agilité (flexibilité et itération). Pour savoir quels processus prioriser, la banque évalue le coût et la pertinence commerciale de chaque processus. Et ça ! à‡a parle aux dirigeants !
- Lancer une communauté en ligne du projet afin de socialiser ses avantages. Cela va aider à clarifier les avantages des méthodologies de design thinking de service, en particuliers pour les ingénieurs.
La communauté rend plus facile la définition du concept, la vision, la transparence, la compréhension, la collaboration et l’engagement. Ce sera également plus facile pour mettre en évidence les contributions personnelles des collaborateurs et le travail exceptionnel des champions du projet.
Chez un fabricant de revêtements de sol, un champion du design de services (en interne) lance, forme et tire parti de plusieurs communautés de collaborateurs (physique et en ligne) pour évangéliser les pratiques centrées client et diffuser l’utilisation du design thinking. Chaque communauté s’engage à former d’autres équipes à la mise en oeuvre du design thinking de services à l’échelle de l’entreprise et des pratiques exemplaires. L’équipe de community management propose un ensemble d’outils et du soutien au niveau compétences…
- Infuser une compréhension commune. Il est important d’utiliser une approche collaborative afin d’établir une compréhension commune des besoins et des attentes des clients et des collaborateurs.
Pourquoi ? Parce que les outils conçus de façon collaborative et permettant la visualisation & comme un persona (personne fictive représentant un segment de clients) conçu de façon hypothétique (sur la base des présomptions et des connaissances des collaborateurs), les parcours client et la blueprint de services & améliorent la compréhension du client.
Un fournisseur de logiciels B2B Français a utilisé des personae hypothétiques conçus par ses propres développeurs pour les aider à faire preuve d’empathie envers ses clients lors du développement d’applications. Ces personae ont également servi à concevoir un site Web centré utilisateurs.
- Cartographier les scénarios de l’alignement des équipes avec une démarche collaborative. Une fois que les équipes sont claires sur la définition et la compréhension du client et de l’expérience attendue, modélisez les nouveaux services & ensemble & afin de créer le nouvel écosystème de services. Aligner les rôles, les services, les fonctions, les interdépendances et les systèmes à l’aide d’une blueprint.
Pour récupérer des clients perdus et être classé à nouveau comme premier dans son secteur, Aramark Parks & Resorts a cartographié (du point de vue du client) la blueprint de l’expérience d’un hôtel concurrent haut de gamme. Puis, ils ont modélisé leur propre expérience de villégiature.
La comparaison des deux blueprints a permis de mettre l’accent sur les différences dans les services, les normes et les processus, entre les deux hôtels. Cette comparaison les a aidés à concevoir de nouveaux services, à moderniser les autres, à former le personnel et à mettre en oeuvre un nouveau système de récompense des clients fidèles…
- Utiliser des ateliers de résolution de problèmes pour animer les discussions sur la blueprint de services. Il est important de s’engager en direct avec les personnes impliquées. Des outils pour la résolution de problème et la prise de décision comme Dialogue Mapping[6] ou l’activité de Brainswarming[7] peuvent aider. Les participants bénéficient du partage d’une vision commune et unifiée et se sentent impliqués, en particuliers les sceptiques.
Une enseigne de GSA a utilisé un atelier de Brainswarming pour aider ses collaborateurs à s’impliquer à l’étape d’idéation, lors de la conception de services. Ils devaient trouver des solutions à un problème d’expérience client au moment du passage en caisse lors du parcours client. L’utilisation de synonymes* pour renommer le problème à résoudre et de la présentation des solutions possibles sous forme de branches et ramifications d’arbre a facilité et ouvert le champ de réflexion sur la façon de délivrer la nouvelle expérience client et ensuite les ressources correspondantes.
Une filiale française d’une marque hôtelière internationale a appliqué une méthode d’analyse des points positifs, qui ont été expérimentés par le passé, lors de l’adoption de changements majeurs. L’objectif était de répliquer les meilleures pratiques ayant fait leurs preuves pour s’en servir de leviers afin d’accompagner le changement en douceur, en reproduisant les succès, au lieu de perturber les gens avec de nouvelles approches.
[(* En fait, ce sont les hyponymes qui ont été utilisés. Les hyponymes sont utilisés pour désigner un membre particulier d’une classe plus large. Par ex. : Monture, Canasson et Destrier sont des hyponymes de Cheval.)
àŠtre clair sur le rôle de chacun et faire appel aux soft skills
Pour éviter les conflits et encourager l’engagement, vous avez besoin de compétences organisationnelles, mais aussi de soft skills[1], pour surmonter la résistance au changement et obtenir un alignement sur la vision, les objectifs et la collaboration. Cela signifie que vous devriez :
- Rassembler des gens dans une équipe projet dirigée par un champion. Le champion peut être trouvé à l’intérieur de votre entreprise, mais peut-être embauché à cette fin. Par ex. vous pourriez être surpris de découvrir que certains managers de votre propre entreprise ont déjà utilisé une approche guerilla (sans approbation préalable) du design thinking.
- Prévenir les conflits au sein des équipes. Donnez un rôle à chaque équipe. Permettez aux designers de jouer le rôle dans lequel ils sont experts et démontrez l’impact de chacun sur l’expérience client. Assignez un objectif commun pour obliger les équipes à collaborer malgré leurs intérêts parfois contradictoires.
- Faire preuve d’empathie pour comprendre les besoins des intervenants lorsqu’ils collaborent. Organisez des ateliers pour mettre en relation les parties prenantes internes (en particuliers les managers) avec les parties prenantes externes (partenaires, clients, sous-traitants, etc.).
Un retailer français a attribué & à chaque participant d’un atelier de design de services & un rôle pour envisager les besoins, les difficultés, et les désirs de chaque partie prenante. Certains ont joué le rôle du PDG, d’autres d’un manager, d’un opérationnel ou d’un client. Rentrer dans les chaussons des autres permet de faire preuve de compréhension.
- Embauchez des personnes empathiques & qui ont la capacité à comprendre et à se représenter ce que ressentent les autres.
Par exemple, une personne avec la capacité à comprendre l’esprit entrepreneurial des exécutifs et donc en mesure d’utiliser des chiffres, des données et des faits pour soutenir les choix dans un esprit analytique, peut aider à l’alignement du CODIR (comité de direction) ou COMEX (comité exécutif).
Ceci dit, une personne empathique envers les dirigeants est aussi très utile pour innover en termes de business model.
- Faire preuve d’empathie pour les parties prenantes. Montrez l’impact sur les objectifs et la prestation de services. Utilisez la visualisation rapide, le prototypage et le mode conversationnel pour donner aux parties prenantes une image concrète de la future solution et des bénéfices qu’elle leur apporte.
Une entreprise française de l’industrie des loisirs a utilisé les communautés de clients pour valider plusieurs idées de services et les « Jobs to Be Done » (les tâches / objectifs) des clients afin de mettre en oeuvre des prototypes rapidement. Son objectif était de prouver le retour sur investissement non seulement au PDG, mais aussi aux équipes et aux partenaires.
Vous êtes encore là ? Chapeau ! Et merci d’avoir lu ce très long article que j’ai eu grand plaisir à écrire et qui j’espère vous a plus.
Mais ce n’est pas fini !
Ce ne serait pas fini, si je ne vous montrais pas la voie pour démarrer…
Par où / quoi commencer ?
Que vous soyez un professionnel de l’expérience client, de l’UX ou un product designer expérimentant pour la première fois le design de service, vous pouvez commencer dès maintenant, sans attendre que le reste de votre organisation maîtrise toute la méthodologie. S’y mettre rapidement fait partie de l’agilité requise dans le design de service.
Pour commencer :
- Trouvez des alliés influents.
Ils vous aideront à lancer votre projet de design de service en tant qu’équipe et à surmonter le « système immunitaire » organisationnel qui nourrit la résistance aux changements.
Donnez à chaque personne une tâche qui correspond à son point fort. Par ex. certains peuvent être des storytellers, qui fabriqueront des histoires convaincantes à partir d’opinions diverses.
D’autres peuvent être des catalyseurs & des facilitateurs naturels & qui aident les gens à se réunir pour résoudre les différends et collaborer. Rassemblez ces alliés en équipe et commencez votre projet, en incluant l’acculturation au programme.
- Rendez l’intangible tangible.
L’essentiel est invisible pour les yeux
Saint-exupéry dans le petit prince
Faites-en sorte que les gens envisagent :
1) l’impact du design de service sur les objectifs business avec un business plan
2) l’influence de leur propre travail sur l’expérience client avec la cartographie de service (blueprint).
3) les bénéfices qu’ils peuvent en tirer à titre personnel.
Utilisez l’un de ces outils pour communiquer et diffuser vos preuves :
- Communauté en ligne ou réseau social d’entreprise,
- Atelier de design de services (ex. blueprint),
- Des présentations délivrées lors de réunions des parties prenantes,
- Ou lors de road show à toutes les filiales & si vous êtes une entreprise mondiale ou avec un réseau national.
- Organisez des ateliers pour expérimenter en direct.
Menez des ateliers de design de services pour favoriser la compréhension, le partage, l’alignement et la collaboration des parties prenantes – afin de les engager.
Proposez-leur d’expérimenter l’une et/ou l’autre de ces activités :
- Les études clients et/ou collaborateurs pour rentrer en empathie, analyser et synthétiser les données recueillies afin de les comprendre,
- Susciter l’idéation et le prototypage pour trouver des solutions et les visualiser,
- Effectuer des tests utilisateurs et collaborateurs, pour vérifier,
- Puis faire des blueprints pour aligner les personnes, les outils et les processus avec l’expérience nouvellement conçue, dans une approche holistique, collaborative et agile.
En conclusion
Je dirais que l’engagement des collaborateurs est crucial pour concrétiser et déployer la prestation de l’expérience client nouvellement conçue. Mais les entreprises françaises n’y parviennent pas, malgré des collaborateurs « en apparence[1] » satisfaits de leur travail.
Pourquoi ? La raison est culturelle. Pour ancrer leur mentalité dans la centricité client, les entreprises françaises devraient passer d’une culture orientée sur les produits à une culture centrée sur les services.
Comment ? Les professionnels de l’expérience client ou du design de services devraient donner la priorité à l’adhésion et à l’implication du comité de direction. Ils doivent investir dans de nouvelles compétences (design thinking, management par l’empowerment, etc.) et favoriser la collaboration entre les équipes.
A vous de jouer maintenant !
[1] UX : User eXperience signifiant Expérience Utilisateur
[2] CX : Customer eXperience signifiant Expérience Client
[3] Selon Forrester Research.
[4] Pour découvrir les étapes pour rendre votre entreprise centrée client, lire gratuitement le short book de Lidia Boutaghane (75 pages) intitulé : « Comment garantir la durabilité de votre business en temps de crise grâce à la centricité client. »
[5] Extrait de Wikipédia : [système de management qui] « (…) permet de disséminer les mécanismes de prise de décision au travers d’une organisation avec une autorité distribuée et des équipes auto-organisées, se distinguant des modèles pyramidaux top-down plus classiques. »
[6] Le Dialogue Mapping est une méthode comme le Mindmapping (carte heuristique) mais pour les conversations.
[7] Pour en savoir plus sur le brainswarming, voir cette vidéo: Brainswarming: Because Brainstorming Doesn’t Work, dans HBR Video par le Dr Tony McCaffrey.
[8] Lire cet article par Erik Flowers, designer chez Intuit, “Going from UX to service design; the stark honest truth no one will tell you!†26 février 2017.
[9] La crise du Covid a surement rebattu les cartes. Le télétravail mal vécu par certains salariés, pour cause de pression continuelle de la hiérarchie, ne doit pas bonifier l’expérience collaborateurs.